AMBOHIMAHAMASINA A L'HEURE DU TOURISME SOLIDAIRE
Le tourisme solidaire est mis à l’honneur par l’intermédiaire du village d’Ambohimahamasina, situé au sud-est d’Ambalavao. Être sortant du Mgimo russe est actuellement bien coté, par rapport à l’énarque frais émoulu ou avoir fait Sciences Pô, par exemple. Enfin, dans la même veine diplomatique, Tom Andriamanoro rappelle que Taïwan est lâché par presque tous les pays membres de l’ONU.
Vie quotidienne – Ambohimahamasina à l’heure du tourisme solidaire
Les noms, disent les anciens, sont comme un champ d’arachide, sous-entendant par là que chacun peut s’y servir comme bon lui semble. C’est pourquoi les villages qui portent le même nom ne se comptent plus, sur les Hautes terres comme sur la côte, cette homonymie tirant souvent sa source des péripéties de l’histoire ancienne. On a, ces derniers temps, beaucoup parlé d’une commune rurale du Moyen-sud où le devis pour la réfection de trois petites salles de classe est arrivé à équivaloir à celui d’un lycée mal en point après le passage d’un cyclone de forte intensité. Et où l’imposant virement effectué à cette fin n’a fait que transiter, pour finir « sur ordre de » dans d’autres comptes déjà bien fournis.
S’agissait-il de l’Ambohimahamasina, ce village-qui-rend-sacré, à une quarantaine de kilomètres à l’est d’Ambalavao, où les croyances ancestrales betsileo sont encore plus vivaces qu’ailleurs, entretenues par la proximité de la montagne élyséenne d’Ambondrombe ? « Peut-être que, peut-être pas », comme dit la chanson. Si oui, cet Ambohimahamasina-là se serait bien passé d’une pareille manigance concoctée dans certaines sphères haut perchées, lui qui est si fier d’avoir trouvé sa voie, et d’être souvent cité en exemple réussi d’un tourisme taillé sur mesure pour Madagascar et son pays profond : le tourisme solidaire, dans lequel les relations entre intervenants, entre « vahiny » visiteurs et « tompon-tany » visités, ne sont plus celles du méhariste et de son chameau. Lui, enfin, qui a créé son propre site écotouristique, géré par le FIZAM, ou Fizahantany Ambohimahamasina, une organisation rassemblant des membres du Vondron’olona ifotony, ou communauté locale de base.
A Madagascar, il est encore prématuré de penser à miser sur le développement de marchés de niche spécifiques. Les différents concepts touristiques s’interpénètrent, avec souvent pour axes centraux le développement durable et l’éthiquement correct, à l’opposé des dérives bien réelles qui, ici comme ailleurs, salissent la première industrie mondiale. Mais quoiqu’on dise, Madagascar est encore loin de certains pays africains où chaque semaine voit régulièrement l’arrivée en groupes de grand-mères fortunées, en mal de jeunes mâles à la peau noire. Question de se dépayser.
Avec le concept de tourisme solidaire, les visiteurs étrangers participent aux travaux des champs àAmbohimahamasina.
Sans artifices
Plusieurs terminologies se complètent donc, et se pratiquent dans une commune sortie de l’anonymat comme Ambohimahamasina et sa région : L’écotourisme, le plus en vogue, caractérisé par l’intégration du tourisme dans la gestion et la préservation de l’environnement. Le tourisme culturel, qui immerge le voyageur dans le patrimoine du pays, autrement qu’au bord de la piscine d’un grand hôtel. Le tourisme équitable, qui exige la limpidité et la transparence dans la gestion, ainsi que la juste rémunération des acteurs. Le tourisme solidaire fondé, comme son nom l’indique, sur des relations de solidarité et d’acceptation de la différence entre visiteurs et populations d’accueil. Le tourisme durable enfin, qui englobe tous les autres, et que l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) définit en ces termes : « les principes directeurs du développement durable, et les pratiques de gestion durable du tourisme, sont applicables à toutes les formes de tourisme dans tous les types de destination, y compris au tourisme de masse et aux divers créneaux touristiques. Les principes de durabilité concernent les aspects environnementaux, économiques, et socioculturels du développement du tourisme. Pour garantir sur le long terme la durabilité de ce dernier, il faut parvenir au bon équilibre entre ces trois aspects ». Des entreprises du tourisme à Madagascar reconnaissent ainsi leur part de responsabilité vis-à-vis des communautés locales où ils exercent leurs activités, et où elles apportent des changements, peut-être pas toujours positifs, mais comportant de nouvelles connaissances et compétences, sans parler des revenus potentiels bénéficiant à une population souvent fragile économiquement parlant. Mais de tous ces concepts de tourisme, le solidaire est certainement le plus délicat à réussir. Comment parvenir à l’intégration de riches touristes venus d’ailleurs dans tous les aspects du quotidien parfois assez spartiate du petit paysan malgache, et pas en simples spectateurs ? Pas facile, et pourtant l’osmose se passe sans anicroche à Ambohimahamasina.
De quoi y vit-on, au fait ? De la culture du riz bien sûr, mais aussi des patates douces, du manioc, des légumes, et des fruits. De l’élevage extensif du zébu, et de la cueillette du miel. L’artisanat est diversifié, allant du tissage des lamba betsileo en soie sauvage ou en coton, à la fabrication de pirogues, en passant par la vannerie et les activités de la forge. Enveloppant le tout, les coutumes et les fady régissent tous les moments de cette vie proche de la nature, et ayant pour cadre un paysage parfois impressionnant de montagnes. Les randonnées d’un hameau à l’autre empruntent les chemins de servitude et peuvent durer plusieurs jours. Les repas sont préparés ensemble, les tâches quotidiennes sont partagées, les « angano » et les croyances se racontent sans artifice. Côté cour, les tarifs d’hébergement chez l’habitant, de restauration et de guidage, sont fixés en comité réunissant les opérateurs et la population. Les paysans choisissent souvent d’investir en priorité leurs bénéfices dans des actions de développement communautaire. Parmi les engagements du tour-opérateur figurent la formation des villageois en matière d’accueil, la promotion du produit et l’information de la clientèle sur la valeur de ce tourisme, l’accompagnement des visiteurs, et la rémunération équitable des acteurs locaux.
Qu’on imagine un instant le cadre supérieur parisien en train de forger une lame de couteau, de tisser lui-même son foulard en soie écrue, de piler le riz, ou de s’essouffler devant un fourneau traditionnel : strictement rien à voir avec le tourisme de carte postale, où l’on bronze certes bien, mais pas toujours intelligemment…
Textes: Tom Andriamanoro
http://www.lexpressmada.com/blog/magazine/bemiray-pour-que-la-mer-ne-soit-plus-la-limite-de-notre-riziere-19-63060/
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